TNT du 9 au 19 février 2006

Doña Rosita la célibataire ou le langage des fleurs

De Federico García Lorca

Mise en scène: Matthias Langhoff

Texte français Luis Del Aguila

 

«Poème grenadin 1900, divisé en divers jardins, avec des scènes de chant et de danse», Doña Rosita la célibataire raconte l’histoire banale et tragique d’une jeune fille qui accepte de laisser son fiancé partir en Argentine et lui promet d’attendre toujours son retour. Les années passent, le fiancé ne revient pas, Rosita continue d’attendre en chantant son amour. Quand enfin elle s’éveille, elle s’aperçoit qu’avec le temps sa vie s’en est allée: la jeune promise du premier acte est devenue une vieille fille.

L’idée de Doña Rosita la célibataire, sous-titrée Le langage des fleurs, a germé dans l’esprit de Federico García Lorca à la suite d’une conversation avec son ami José Moreno-Villa. Il y apprit la vie d’une fleur: la rosa mutabilis. Onze ans s’écoulèrent entre cette conversation et l’éclosion, sur scène, de «Rosita», la petite rose, en décembre 1935, quelques mois avant l’assassinat de Lorca par les franquistes. À travers cette pièce, située à Grenade, l’auteur souhaitait évoquer les «temps où les rossignols chantaient vrai et où les jardins et les fleurs avaient un prestige de roman », ces temps doux et fleuris, qui pourtant cachaient des drames entêtants: ceux «de la bigoterie espagnole, du désir de jouir que les femmes doivent refouler par force au plus profond de leur corps enfiévré».

Cette volonté de pourfendre les tabous de la société espagnole ne pouvait laisser indifférent Matthias Langhoff qui, depuis plus de quarante ans, ne cesse de bousculer les conventions théâtrales. Il était sans doute inévitable que ce metteur en scène, dont la prédilection pour les univers baroques n’est plus à démontrer, se tourne vers Federico García Lorca, après avoir présenté le Borges d’un autre Espagnol, Rodrigo García – au TNT en avril 2003. Courtisant Doña Rosita la célibataire, Langhoff réunit ici théâtre, danse et musique pour exorciser l’amour délaissé, le vieillissement, la douloureuse absence à soi-même: «J’ai sept cœurs, mais le mien, je ne le trouve pas.»