TNT du 19 au 26 novembre 2005

Le Menteur

Pierre Corneille / Mise en scène: Jean-Louis Benoit

 

La Comédie-Française en tournée présente

Comédie en cinq actes de Pierre Corneille

On l’a beaucoup comparée aux autres pièces de Corneille. On l’a souvent jugée plus fine que les comédies de jeunesse et cependant moins digne d’intérêt que les tragédies flamboyantes qui la précèdent immédiatement. Et pourtant, Le Menteur fait partie de ces œuvres jouées cent fois, qui ne quittent pas l’imagination des metteurs en scène. Comme si l’on ne devait jamais épuiser sa complexité légère. En 1643, l’auteur a encore dans l’oreille les grands succès tragiques du Cid et de Cinna. Il donne La Mort de Pompée puis livre au public français ce qu’il présente lui-même comme «quelque chose de plus enjouéqui ne sert qu’à[…] divertir»: à partir du canevas d’une espagnolade, il brode le parcours d’un jeune provincial fraîchement arrivé dans la capitale.

Sur la Place Royale, les jeunes gens jouent de l’épée, tandis qu’aux Tuileries les belles oisives flânent. À peine arrivé et déjà impatient, Dorante se rêve au cœur de cette jeunesse dorée. Il se compose donc l’existence d’un héros romanesque, qu’il conte à l’envi et à l’infini. Mensonges et stratagèmes deviennent la matière de ses récits. Corneille, en génial montreur de marionnettes, révèle à travers lui l’illusion théâtrale. Comme Scapin ou le Revizor, ce menteur fabrique merveilles et histoires pour exister dans le regard des autres, au risque de s’y perdre.

Tous ces «menteurs» sont des personnages hauts en verbe et Jean-Louis Benoit, metteur en scène et directeur de la Criée à Marseille, leur aura donné vie les uns après les autres ces dernières années sur la scène de la Comédie Française. Véritables «machines à fiction, mais pleins de failles», ils courent derrière leur délire, du quiproquo initial d’où naît toute l’intrigue, jusqu’à l’heureux dénouement.

«Ultime recours à la comédie» chez un Corneille qui n’y reviendra plus, Le Menteur porte en lui du doute et du mystère. Par sa sincérité, Denis Podalydès lui rend allegro tous ses charmes. Dont le moindre n’est-il pas de savoir rire de nous?